
© Vincent Bizien
 
		
		 
	
		Usant du blanc de la page comme d'un outil, Vincent Bizien déroute nos  habitudes perceptives par ses dessins lacunaires. L'ordonnancement des  éléments qui les compose n'est lié par aucune logique apparente. Des  silhouettes humaines, des élements de paysage et des formes non  identifiables flottent sans attache en surface, dépourvues de tout  contexte. D'où surgissent-elles ? Sur quel monde ouvrent-elles ?  Précises et minutieuses dans leurs effets, elles sont les concrétions  accidentelles d'une chaîne graphique de transformations. Des nez, des  bras, des jambes et des chevelures s'agrègent pour former des corps  étranges, semblables à ceux d'une marionnette que manipulerait une  volonté extérieure. Les membres manifestent parfois une curieuse  autonomie, ouvrant les corps à d'énigmatiques échappées organiques. Les  dessins sont aussi un prolongement du corps de l'artiste qui y met  parfois les doigts ou mixe ses cendres de cigarettes au jus des encres.  Afin d'éncourager cette libre circulation des flux, Vincent Bizien  conserve une forme d'inachèvement volontaire à ses dessins. Il la  contrebalance en y articulant des espaces suffisamment construits pour  faire circuler le regard, l'absorber dans l'exercice d'un déchiffrement  anxieux. Notre curiosité émoussée reste ainsi suspendue à la qualité  silencieuse d'une page vierge ou à un magma d'encre qu'elle devine  pleine de figures à naître. Elle explore ces zones d'incertitude et se  laisse à son tour traverser par elles.
Liant des pôles antithétiques  par un jeu de gradations sensibles, Vincent Bizien opère des glissements  entre l'humain et l'inhumain, le familier et l'inouï. La violence qu'il  distille passe aussi par un style lacunaire qui, n'asseyant jamais  totalement la composition, la maintient en tension.
Texte pour le livret d'exposition 
Fais gaffe Bobby ! T'entends pas ? Y'a mes os sous le gravier, (extrait). Galerie Le Réalgar, sept-oct 2011.